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Un « 👍 » peut-il suffire pour conclure une transaction immobilière? Ce que les courtiers et agents immobiliers doivent savoir à propos de la loi et les émojis

Ce que les tribunaux disent de l’utilisation des émojis lors de négociations contractuelles. 

Depuis 2023, les tribunaux de la Saskatchewan sont aux prises avec la notion qu’un émoji « pouce levé » pourrait constituer l’acceptation d’une offre et créer un contrat exécutoire. Récemment, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a clairement indiqué que cette notion ne s’appliquait pas aux transactions immobilières.

Une entente d’achat et de vente est essentiellement un contrat, qui repose sur certaines conditions essentielles :

  1. il doit y avoir une offre;
  2. il doit y avoir acceptation de cette offre;
  3. il doit y avoir une contrepartie (en langage juridique, cela signifie qu’il y a échange d’une valeur, généralement une somme d’argent).

Pourquoi ces deux décisions judiciaires portant sur des contrats semblent-elles contradictoires? Et quelle sera la suite des événements? 

Remarque : Nous n’envisageons pas pour l’instant d’ajouter des émojis aux formulaires WEBForms® – ACI à moins, bien sûr, que la Cour suprême du Canada n’insiste.

L’affaire Achter Land & Cattle Ltd. c. South West Terminal Ltd. en Saskatchewan

South West Terminal Ltd. (South West) a déjà acheté du grain de Achter Land & Cattle Ltd. (Achter). Lors de transactions antérieures, South West préparait un contrat standard et Achter le signait. Mais dans l’affaire susmentionnée, lorsque South West a envoyé le contrat par message texte, Achter a répondu par un émoji « pouce levé » (👍) au lieu de le signer.

Achter n’a jamais livré le grain. 

Une dispute s’en est suivie. 

South West a invoqué une rupture de contrat. 

Achter a fait valoir qu’il n’y avait pas de contrat. 

Le contrat a été évalué à environ 58 225,62 $.

Le tribunal a estimé que les parties s’étaient entendues sur les conditions essentielles, créant ainsi un accord exécutoire. L’émoji « pouce levé » constituait une acceptation du contrat, équivalente à une signature numérique. L’affaire a même été portée devant la Cour d’appel de la Saskatchewan, qui l’a confirmée. 

Mais tous les tribunaux ne sont pas prêts à accorder autant de pouvoir aux émojis. 

L’affaire Ross c. Garvey en Colombie-Britannique

Parallèlement, à Saanich, en Colombie-Britannique, M. Ross et la famille Garvey négociaient la vente d’une propriété de 115 ans. Comme vous pouvez l’imaginer, la valeur du contrat (approximativement 760 000 $) était beaucoup plus élevée que celle du contrat de vente de grain en Saskatchewan. 

Et devinez quoi? Dans sa décision, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a tenu compte des formalités juridiques et, dans une moindre mesure, de la valeur, dans les transactions immobilières.

L’acheteur, M. Ross, a rédigé une offre d’achat pour la propriété. 

Les vendeurs, les Garvey, ont rédigé une contre-offre, mais ne l’ont pas signée. 

L’acheteur a envoyé un courrier électronique aux vendeurs pour les informer qu’il acceptait leur contre-offre. 

L’acheteur confirme à nouveau son acceptation, cette fois par message texte. 

L’un des vendeurs a répondu au message texte par... vous l’avez deviné... un émoji « pouce levé ». 

Les vendeurs n’ont jamais apposé leur signature sur la contre-offre. 

Il s’en est suivi un litige juridique. 

L’acheteur prétendait qu’il existait un contrat exécutoire; les vendeurs affirmaient qu’ils n’avaient pas signé de contrat.

La Cour suprême de la Colombie-Britannique a donné raison aux vendeurs en soulignant qu’en vertu des lois de la province, la vente d’un terrain nécessite une signature. Un émoji « pouce levé » ne peut pas remplacer une signature manuscrite ou numérique dans un contrat de transaction immobilière. 

Quelle sera la suite des événements?

Achter, le fournisseur de grain dans l’affaire en Saskatchewan, a déposé une demande d’autorisation d’appel auprès de la Cour suprême du Canada (« CSC »). Cela signifie que la plus haute instance du Canada pourrait bientôt se prononcer sur la question de savoir si un émoji peut indiquer l’acceptation d’un contrat et lier des parties. 

La CSC peut soit faire droit à la demande (et entendre l’affaire), soit la rejeter (en se ralliant à la décision de la Cour d’appel de la Saskatchewan).

Bien que la CSC n’entende qu’environ 10 % des appels demandés, le fait que des tribunaux de différentes provinces soient parvenus à des conclusions différentes pourrait bien inciter la CSC à intervenir. 

Et, soyons honnêtes, combien de fois la CSC a-t-elle l’occasion d’insérer des émojis dans un jugement?

À retenir

  1. Faites attention lors de l’utilisation d’émojis.
  2. Lorsqu’il s’agit d’officialiser un contrat d’achat ou de vente, il peut être préférable de s’en tenir à une signature manuscrite ou numérique.

Les affaires citées dans cet article peuvent être consultées en ligne dans leur intégralité (en anglais seulement) : 

Alim Jessa

Alim Jessa, avocat-conseil à l’ACI, a exercé le droit à titre d’avocat plaidant pendant plusieurs années. Il met maintenant à profit son expérience pour interpréter des contrats et des lois afin de fournir à l’ACI, ainsi qu’aux chambres et associations, des conseils pratiques en ce qui concerne les lois sur la protection des renseignements personnels, CANAFE et la gouvernance d’entreprise. Dans ses temps libres, Alim aime voyager, cuisiner sur le barbecue et passer du temps en famille.

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